Le Niel et les abeilles

Publié le 13/07/2017

Il y a deux ans, nous dressions le portrait de Bertrand Laurentin, un jeune entrepreneur local qui s’apprêtait à lancer Label Abeille, un système innovant de ruches connectées. La semaine dernière, celui-ci a intégré l’un des open space de la Station F, l’énorme incubateur numérique parisien lancé par Xavier Niel, le patron de Free.

LABEL ABEILLE - Article paru dans La Tribune Hebdo d'Orléans en juillet 2017


Sur l’écran de son smartphone, Bertrand Laurentin fait défiler les photos prises la semaine dernière, lorsqu’il a été retiré son badge à la Station F. Ce gigantesque bâtiment de 34 000 m2, situé à deux pas de la gare d’Austerlitz, a été inauguré en grande pompe, à la fin du mois de juin, par Emmanuel Macron himself. Ce lieu a d’ores et déjà été présenté comme le « plus grand incubateur de start-up » au monde et le président de la République, pas bégueule, a chaleureusement salué, lors du grand barnum d’ouverture, « la générosité et l’intelligence » de Xavier Niel, le patron de Free, grand architecte de ce projet qui devrait accueillir plus de 3 500 start-upers. C’est cet endroit que l’Orléanais Bertrand Laurentin a intégré, tout en gardant un pied à Fleury-les-Aubrais, où est localisé le siège de sa société, Bee Angels. L’entrepreneur loirétain espère y développer là-bas son réseau et dénicher quelques partenaires financiers supplémentaires pour mener à bien son projet initial de ruches connectées, lancé il y a un peu plus de deux ans.


Problèmes dans l'industrialisation

Aujourd’hui, plusieurs grosses entreprises ont déjà souscrit aux solutions proposées par Label Abeille, de Thélem en passant par le Crédit Agricole ou encore Groupama. Bertrand Laurentin avait aussi pu compter à l’époque, sur le soutien de Daniel Guillermin, l’ancien président de la CCI du Loiret ex-PDG de Shiseido International France. C’est d’ailleurs ce dernier qui lui a mis le pied à l’étrier pour présenter sa candidature au Réseau Arts et Métiers Accélération, qui dispose de plusieurs postes au sein de la Station F. 

Si cette intégration est une bonne nouvelle en soi pour Bee Angels, la société s’est cependant récemment heurtée à un gros problème lors de la phase d’industrialisation de ses ruches connectées. « J’ai entamé une démarche judiciaire envers le partenaire industriel avec lequel je travaillais », explique sommairement Bertrand Laurentin, qui déclare toutefois « vouloir aller de l’avant. » « Tout cela nous fait grandir », préfère-t-il penser, persuadé que son idée reste fiable et pérenne. « Il n’y a, aujourd’hui, pas de produits concurrents sur le marché, poursuit-il. De plus, les entreprises ont un besoin d’image que nous pouvons leur offrir, en termes de Responsabilité Sociale des Entreprises ou de parrainage. Mon créneau, c’est l’early stage, l’environnement green, avec des clients en B to B ou en B to C », se projette-t-il en revenant sur son intégration à la station F. « Je possède 100 % de ma boîte, je suis attractif. »

« Dur d'embaucher »

Bee Angels recherche aujourd’hui des profils de commerciaux pour vendre la solution Label Abeille. « Mais en région Centre-Val de Loire, c’est compliqué d’embaucher et de trouver de bons commerciaux et de bons stagiaires, soupire Bertrand Laurentin. J’ai bien ciblé ma première collaboratrice, nous avons fait un bon travail ensemble et réussi à monter une équipe forte. Mais maintenant, oui, il faut que je trouve des compétences qui puissent vendre nos ruches connectées. Et éventuellement des gens qui sachent faire du code, des techniciens du web. » À bon entendeur (bis)…


"Le produit plaît"

Il faudra toutefois rapidement dégoter le partenaire industriel qui permettra aux ruches connectées de conquérir de nouveaux marchés. « Il faut qu’en 2018, je puisse compter sur une électronique new generation, concède Bertrand Laurentin. J’ai déjà sorti la version V2 de l’application mobile. » Convaincu, il assène : « le produit plaît aux apiculteurs. Mais désormais, je veux vendre un produit qui soit au top. » En attendant, les dysfonctionnements apparus lors de cette phase d’industrialisation ont mis à mal la campagne de crowdequity* enclenchée il y a quelques mois. « Ce problème industriel nous a empêchés d’aller plus loin dans cette levée de fonds », glisse l’entrepreneur.

En début de semaine, Bertrand Laurentin tenait cependant à rappeler les soutiens locaux qu’il avait reçus de la part de certains partenaires originels, comme le Crédit Agricole, Initiative France, la BPI ou la Région, pour ne citer qu’eux. « Ils ne nous lâchent pas en cours de route », martelait le créateur de Label Abeille, qui n’ignore pas que, dans le microcosme local des start-up et start-upers, chaque mot pèse son pesant de cacahuètes. À bon entendeur. 

Benjamin Vasset


*Le crowdequity est un système de financement différent du crowdfunding, dans le sens où les internautes financeurs d’un projet deviennent actionnaires d’une entreprise.