QVT et biodiversité : le confinement vous a-t-il enfin ouvert les yeux ?

Publié le 15/05/2020

Dans ce contexte inédit de reprise d’activité, la qualité de vie au travail est plus que jamais devenue centrale. Pour s’en assurer, des indicateurs de qualité de l’environnement doivent être mis en place et durablement suivis. Saviez-vous que nous pouvions la mesurer grâce aux abeilles ? Label Abeille en a d’ailleurs fait son leitmotiv : le retour à la nature, ou comment utiliser la technologie pour mieux comprendre les pollinisateurs et leurs messages de sentinelles de l’environnement. 

A l’aide des données collectées par la ruche connectée et nos observations sur le terrain,  nous dressons aujourd’hui un premier bilan de la situation post-confinement. 

 

Le confinement a-t-il rendu les abeilles plus productives en miel ?

Au regard des mesures recueillies ces dernières semaines, à court terme nous sommes optimistes. Au lendemain de l'hiver, le printemps et ses températures élevées ont brutalement surgi, apportant de belles floraisons sur le territoire national. Les premières données collectées ont montré un beau démarrage des colonies saines et des premières miellées de qualité et en quantité. La période concomitante avec le confinement n’est que coïncidence…

Mais l’utilisation de la technologie n’exclut pas d’observer la nature et celle-ci nous donne de précieux éléments pour les prochaines semaines. Certes la météo de ce début de printemps s'est montrée très favorable pour le lancement de la saison apicole 2020 et l'activité des abeilles. Mais pour une bien triste raison qui aura de fortes répercussions dans les prochains mois : le réchauffement climatique.

 


Les conséquences à moyen-terme 

Première conséquence à cette nouvelle qui parassaît des meilleures : les floraisons de printemps se sont enchaînées et parfois anormalement chevauchées. C’est par exemple le cas de l'acacia qui a fleuri avec tellement d'avance cette année qu'on le trouve presque partout au milieu d'aubépine en fleurs ou plus rarement de colza tardif dans les zones rurales à forte exploitation agricole. Ce printemps promet donc de multiples floraisons et sans doute de très beaux rendements pour les apiculteurs professionnels qui auront plus de temps pour exploiter plus de fleurs.

Malheureusement la sécheresse, dommage collatéral du réchauffement climatique, risque de poindre très rapidement et d'anéantir les floraisons ou la montée de nectar. Sans eau pas de nectar ni de fleurs… Le risque de disette à l'été 2020 est donc très important si les pluies ne se montrent pas généreuses d'ici là, ou si nous connaissons un nouvel épisode de canicule. D’autant plus que cette période de l'année demeure plus réservé en ressources. Il est donc essentiel de semer dès à présent des plantations et jachères mellifères pour assurer un garde-manger estival aux abeilles.

A lire : disparition des abeilles, quelles conséquences ?



Une question de point de vue

Tout ça n'empêche pas des apiculteurs de métier de communiquer à la presse qu'ils n'ont jamais vu une telle récolte de printemps depuis 20 ans ! Que les productions ont doublées, que le ralentissement de l'activité humaine durant ce confinement sauve la planète et les abeilles...  Or il est peu probable que le reste de la saison suive de façon linéaire le succès de cette première récolte de printemps. Il existe des disparités selon les pratiques apicoles, les espèces d'abeilles, le type de miel et les les phénomènes météo locaux et par conséquent chaque région.

Toutes ces nouvelles qui paraissent positives cachent en réalité un problème de fond : la disparition des abeilles, malheureusement toujours d’actualité quelque soient les quantités de récolte. La baisse du nombre d'apiculteurs professionnels en témoigne.

 

Pas de confinement pour les abeilles

Malgré le confinement et ces conditions exceptionnelles, le Covid 19 n'aura pas impacté l'activité des abeilles ni favorablement ni négativement, si ce n'est la qualité de l'air (encore difficilement mesurable sur l'ensemble du territoire). La biodiversité n'aura pas non plus été épargnée car les traitements pesticides insecticides ou fongicides n’ont pas été réduits, bien au contraire.

La baisse de l'activité humaine a toutefois laissé un peu de répit au fauchage dans les communes et collectivités ou au bord des routes. Les régions ne fauchent plus les routes nationales et les ronds-points sont laissés au repos par les départements, permettant aux abeilles d’y trouver des ressources nutritives. Nous regrettons d'ailleurs qu’en temps normal le fauchage ne soit pas plus raisonné…

 


Des modes de consommation adaptés

Les apiculteurs qui ont l'habitude de vendre leur miel sur les marchés (majoritairement fermés durant le confinement) ont dû réorganiser leur circuit de vente et adapter leur perte de chiffre d'affaires. La vente de produits locaux a toutefois de l'avenir puisque certains commerces ont vu leurs ventes de miel augmenter significativement. 

La grande distribution va devoir adapter ses ventes de miel et se tourner vers un miel français labellisé récolté dans des conditions de qualité et de traçabilité optimum (les miels jusqu’ici vendus étaint bien souvent importés ou melangé).

Le baromètre des récoltes en France va bientôt pouvoir être publié par le Label Abeille.

 

Chacun voudrait sauver les abeilles

Dans le monde apicole la prise de conscience ne date pas d’aujourd’hui. On voit fleurir de plus en plus de sites internet et d’inventeurs de systèmes connectés pour ruches voulant sauver les abeilles et l'apiculture de tous les maux. Ruche connectée, balance, autres compteurs d’abeilles, systèmes de mesure sonore voir même olfactive… La technologie au secours des abeilles devient un vrai casse-tête pour la filière apicole.

Malheureusement peu atteignent un stade industriel ou de commercialisation car les investissements humain et financier pour un produit de qualité est très important (plusieurs dizaines voire plusieurs centaines de milliers d’euros incluant l’embauche de personnes et les démarches certifications). Ces multiples offres restent donc au stade de promesse et polluent la lecture de ce marché ou le choix d'un apiculteur amateur ou professionnel de s'équiper avec un matériel de qualité.

 A lire : qu'est-ce qu'une ruche connectée ? 

La morale de ce tragique épisode

Il faut maintenant espérer un déconfinement et une reprise de l'activité progressive, organisée et réfléchie afin de ne pas reproduire les erreurs du passé. Beaucoup espèrent de cette crise économique un nouveau départ.

Les abeilles vous avaient sans doute prévenues mais il fallait pour cela les écouter et s'assurer que l'on communique sur la même fréquence ou que l'on parle le même langage.

Label Abeille sait parler aux abeilles et les comprendre... à vous d'entendre et et d'agir pour soutenir leur cause.

 

Bertrand Laurentin

Label Abeille